Nous ne remercierons jamais assez Iello de nous avoir envoyé cet exemplaire de test pour pouvoir vous donner notre avis sur ce jeu, qui, de prime abord, nous a laissé froid comme un iceberg. Mais les gens de chez Iello sont fourbes, et nous les soupçonnons d’avoir cerné ce qui nous plaisait car, après une bonne paire de parties, on a plutôt envie de vous conseiller de l’acheter, ce jeu.
Le Nord. Non, pas le Nord de « Bienvenue chez les Chtis », l’autre. Le Nooooooord. Le Grand Nord. Peuplés de Pingouins, d’Ours Blanc prêts à vous décapsuler la tête pour se repaitre ensuite de vos entrailles, de phoques trop choupi qu’il faudra attraper pour en faire des manteaux et des chaussures seules capables de vous préserver du froid polaire. C’est de ce Nord-là dont il est question ici.
Celui qui vous mettra dans la peau d’un chef de clan, tantôt porté sur le nomadisme, tantôt sur la chopine… mais avec toujours à l’esprit la nécessité vitale, que dis-je, presque viscérale de conquérir, de s’imposer aux autres par la force, la ruse ou la traîtrise pour étendre son emprise sur ce territoire désertique et hostile et constituer un véritable Empire… du Nord (vous y êtes ?)
Empires du Nord est la dernière itération d’une série qui a déjà connu quelques titres tant dans la sphère vidéoludique que dans notre petit monde du jeu de société. Impérials Settlers, car c’est de lui qu’il s’agit, nous met donc en charge de constituer un empire, de le développer, en nous mettant dans la peau d’un chef de clan qui devra partir de pas grand-chose pour atteindre des objectifs lui assurant gloire, prospérité et panse bien tendue.
De prime abord, le joueur non averti espèrera trouver là un jeu très sérieux, à la Civilisation, avec des tokens par centaines, des dés à ne plus savoir qu’en faire, des meeples… Oh, wait, en fait, on a bien un joli tas de matériel… mais là s’arrête l’aspect « sérieux » du jeu dont il est question aujourd’hui. Parce qu’en jetant un œil même rapide à la boîte et à son contenu, on comprend vite que le jeu se veut beaucoup plus agréable à jouer, en offrant des illustrations chatoyantes, des personnages à la physionomie bonhomme et presque enfantine, et des règles aussi succinctes que bien écrites. C’est simple, on se croirait presque dans un jeu pour enfant.
Presque…
Toute la nuance tient dans ce mot. Parce que si les meeples qui vont peupler notre empire sont d’un joli rose bonbon, si les moutons qu’on enlève sont vraiment « trop meugnons », si les illustrations vous rappellent irrésistiblement les albums d’un certain Gaulois et de son ami ventripotent, le fond du jeu n’en demeure pas moins bien corsé et vous assure quelques belles réflexions pour décider de la carte à jouer, de l’effet à activer ou de l’action à déclencher au bon moment.
Pour ajouter à tout ça, le mode solo se veut en plus très nerveux et dynamique. Ainsi, vous n’aurez que 4 tours pour atteindre l’objectif de l’un des 4 scénarios de la boîte de base (4 extensions existent déjà, qui rajoutent des clans supplémentaires et des points de règles qui renouvellent l’expérience). Le jeu se prête de plus parfaitement à la rédaction de scénarios « fan made », Iello encourageant même l’experience en proposant un petit PNP reprenant le graphisme du livret de scénario « officiel ».
Veni, Vidi, Vinci (oui, enfin, Vinci… faut voir)
En ouvrant la boîte, on s’arrête d’abord sur le nombre de rangements. Parce que proposer un jeu avec une multitude de tokens en tout genre, c’est toujours sympa, mais quand il s’agit de mettre la partie en place, ou de ranger le jeu une fois la partie terminée, on a souvent tôt fait de critiquer plus ou moins vertement ces fichus sachets et réclamer à cor et à cri des rangements dignes de ce nom. Dans Empires du Nord, rien de tout ça, et c’est à souligner ! L’éditeur nous propose en effet du thermoformage pour l’intégralité des Tokens et des cartes (y compris pour le matériel des extensions). La mise en place en est d’autant accélérer et c’est très agréable. Comble du bonheur, le « rack » à token s’enlève pour être disposé directement sur la table de jeu. YES !
On est ensuite sous le charme des illustrations, des cartes qui représentent nos petits peuples en pleine activité de récolte, de construction, de conquête ou de beuverie, des meeples roses super mimi, des ressources colorées en tout genre (et en bois)… Seul le tableau pour suivre les points ne nous est pas apparu très inspiré.
Puis, on se saisit du livre de règles, on s’assoit tranquillement dans un bon fauteuil, et on parcourt les règles qui sont aussi brèves que claires. On y reviendra régulièrement, au départ, pour préciser un ou deux points de règles tant les clans sont différents et amènent leur lot de particularités.
Chaque joueur démarre la partie en choisissant un clan parmi les 6 à sa disposition dans la boîte de base. Attention à jeter un œil à la règle, car chaque clan correspond aussi à un niveau de difficulté, et s’il est tentant de laisser parler notre sensibilité artistique, nous ne serions que trop vous conseiller, au début, de choisir l’un des deux clans les plus accessibles.
Une fois vos couleurs choisies, vous commencez votre empire en positionnant les trois « champs » de base propre à chaque clan, puis vous piochez 5 cartes pour n’en retenir que 3. Les deux cartes écartées sont défaussées. Vous récupérez les ressources qu’offrent vos champs (moutons, pierres, bois, pommes) et vous démarrez votre civilisation avec 5 villageois.
À la différence du jeu à plusieurs, qui s’arrête lorsqu’un joueur a atteint 25 points, une partie Solo se déroule en 4 manches, elles-mêmes divisées en plusieurs phases :
- La phase d’observation : vous piochez 4 cartes, et vous en achetez le nombre que vous souhaitez en « défaussant » un citoyen par carte conservée. Ces villageois ne seront plus disponibles pour cette manche et ne reviendront en jeu qu’à compter du tour suivant.
- La phase d’action : vous posez vos cartes, vos décidez de vos actions, vous activez les actions mentionnées sur les cartes posées dans votre empire, vous partez explorer ou naviguer entre les îles qui composent votre territoire afin de les piller ou de les conquérir…
- La phase d’exploration : Si vous vous êtes senti l’âme d’un marin, il est temps de récupérer les ressources convoitées, mille sabords !
- La phase d’entretien : on redresse les cartes activées, on récupère ses villageois, on choisit un jeton pour définir une action aléatoire qui nous affectera positivement ou négativement au tour suivant et on repart dans une nouvelle phase et…. C’est tout.
Globalement, Empires du nord tient dans ces 4 points. Pour le joueur solo, il s’agira d’enchaîner les actions pour atteindre le score fixé par l’un des 4 scénarios tout en respectant les contraintes qu’il prévoit. Ainsi votre niveau de ressources pourra être ajusté, vous serez parfois limité dans le nombre de lieu à poser et vous devrez, avant chaque tour, choisir 1 jeton parmi 5 (on a préféré à cette méthode le lancer d’un dé 6) pour subir un aléa qui vous impacte (très souvent négativement).
Faute avouée…
Puisque vous n’aurez que 4 tours, il vous faudra optimiser, optimiser et encore optimiser. Depuis les cartes utilisées, jusqu’aux ressources consommées en passant par les iles visitées, tout devra être réfléchi si vous voulez réussir à atteindre votre cible. Vous n’aurez pas le temps de construire un moteur qui génèrera des montagnes de points en fin de partie et il vous faudra à l’inverse penser à l’instant d’après, celui qui vous permettra de gagner un PV supplémentaire, au moment de naviguer vers une île à conquérir en fonction de vos besoins en ressources… car tout est rare dans Empires du nord : vos ressources, vos villageois et le temps.
Pour être tout à faire honnête, je n’attendais rien de ce Empires du Nord. Les illustrations de la boîte me paraissaient très enfantines et loin de mon univers, le pitch de départ et le matériel dans la boîte me semblait de belle qualité, mais un peu chiche, notamment le nombre de cartes, me faisant craindre pour la rejouabilité, et l’absence d’un (joli) plateau pour matérialiser notre civilisation laissait un grand vide sur ma table de jeu.
Oui, mais voila, une fois la partie de découverte des règles passées, je dois bien avouer que le charme a opéré. La rapidité à mettre en place une partie, les règles simples et efficaces, la diversité des actions, l’intelligence des scénarios… tout m’a plu dans Empires du Nord. À tel point qu’après à peine quelques parties, il m’en a fallu plus. J’ai dans la foulée commandé deux extensions : les Clans Egyptiens et Japonais. Les autres suivront pour varier encore un peu plus les parties.
On aime
- Les rangements qui aident à mettre en place une partie et à ranger le jeu rapidement : une bénédiction
- La nervosité de la partie : 4 manches, ce n’est RIEN et il faut aller très vite et optimiser ses choix.
- Le matériel et les illustrations qui fonctionnent hyper bien
On aime moins
- Le manque d’un plateau sur lequel on pourrait matérialiser notre peuple
- Reconnaître ses bateaux dans la boîte relève parfois de la gageure
- Pas de marqueur de tour, pas simple de s’y retrouver (nous, on a pris deux marqueurs actions)
Vous aimerez si
- Le premier Imperial Settlers vous a plu
- Vous aimez Age of civilisation (tant la version J2S que JV)
- Vous voulez un gros jeu, vite sortie, et vite rangé
Vous aimerez moins si
- Les illustrations enfantines vous laissent de marbre
- L’optimisation est une notion qui vous est parfaitement étrangère
- Vous n’aimez pas les jeux trop nerveux et avez besoin de laisser la partie s’installer.
Imperial Settlers : Empires du nord – Edité par Iello
- de 1 à 4 joueurs
- à partir de 10 ans
- environ 45 minutes