Depuis que j’ai démarré l’aventure Plateau Solo, l’une des questions que l’on me pose le plus souvent en privé, c’est de savoir quel était mon livre dont vous êtes le héros préféré, dans les années 80-90. Comme beaucoup en effet, j’ai découvert le jeu de rôles et d’aventures par le biais des proses de Steve Jackson et de Ian Livingstone, et pendant des années j’ai vécu avec passion les aventures proposées par Joe Dever (Loup Solitaire), JH Brennan (Quête du Graal), John Butterfield (Althéos), et tellement, tellement d’autres. Pourtant, si je ne devais garder qu’un seul de ces merveilles ludiques (il y a eu de véritables pépites qui ont autant leur place en jeu qu’en Littérature avec un grand L, ce serait sans doute l’un des plus atypique d’entre eux. Ici point d’épée magique ou de gobelin cupide, pas de voyage spatial ni de trip à la Mad Max, pas d’enquête ni de voyage dans le temps…
Le pitch ? Vous êtes un agent secret. Du moins vous étiez un agent secret, il n’y a pas si longtemps que cela. Mais à un moment vous avez perdu le fil. Avez vous découvert un secret trop compromettant ? Avez-vous commis une bavure effroyable ? Auriez-vous pas hasard essayé de démissionner ? Vous ne savez plus trop. Ce qui est sûr, c’est que vous êtes assigné à résidence dans une curieuse ville souterraine, totalement isolée du reste du monde. Vous n’y êtes pas seul, d’ailleurs : vous croisez de nombreux autres habitants aux personnalités hautes en couleur. Mais sont-ils des prisonniers… ou des gardiens. Et plus important que tout : comment diable allez vous sortir d’ici ? Dépêchez-vous de trouver une solution : à la fin de la semaine, vous subirez un lavage de cerveau qui vous lavera la mémoire.
Pourquoi on aime ce jeu ?
Le Prisonnier, sorti en 1988, est un fantastique hommage à la tout aussi fantastique série TV éponyme de la fin des années 60. Mais au delà de l’hommage, ce livre jeu est une merveille de construction qui transgresse tous les codes établis par les précédents livres dont vous êtes le héros, aussi bien ceux de la même série (l’Agence des Missions Spéciales, un James Bond-like un peu beauf et très franchouillard) que l’ensemble de la production de cette époque. En effet, il n’y a pas de trame scénaristique et épique (comme on la trouve dans La traversée Infernale, ou dans La Venageance du Ninja, par exemple), mais un huis clos oppressant avec des interlocuteurs qui jouent probablement double jeu.
Le livre est en effet uniquement construit autour d’un plan, disponible au paragraphe 1. Ce plan détaille tous les lieux accessibles de la ville pour le joueur. Si ce dernier décide de visiter l’un d’entre eux, il lui est demandé dans le jeu quel jour de la semaine il se trouve et quelle heure il est. En effet, un semainier permet au joueur de savoir précisément quel jour il est et combien de temps durent chacune des actions qu’il entreprend. En fonction de l’heure et du jour, il rencontrera des personnes différentes et pourra alors effectuer des actions différentes. Chaque partie commence le lundi matin, et se finit le dimanche soir. Il n’y a donc pas de parcours scénarisé et préétabli, mais une liberté de mouvement quasi total sur une carte fixe (un peu comme pour un Sherlock Holmes Detective Conseil), avec en plus une notion de temporalité qui ajoute au stress du joueur. Une fantastique réussite de l’auteur, Pierre Rosenthal, notamment connu pour ses très nombreuses collaborations avec Casus Belli.
A suivre ?
Le Prisonnier est le dernier volet d’une saga de 3 volumes. A ma connaissance, aucun autre LDVELH de ces années n’a repris cette structure narrative. On retrouve néanmoins le principe de la liberté de mouvement dans les séries Fabled Lands ou Destiny Quest,
Où le trouver
Sur un coup de bol, dans une brocante pour 1 euro. Ou bien en passant une annonce sur Facebook, mais pour beaucoup, beaucoup plus cher (entre 20 et 50 euros). En tout cas, moi je garde le mien 🙂
Le détail qui tue
Trouver la sortie. Non mais vraiment.
Lien
Le Prisonnier sur La Taverne des Aventuriers