Sorti en 2015, T.I.M.E Stories est un titre désormais bien connu sorti chez Space Cowboys, qui propose une fusion de Jeu de rôles et de jeu de Plateau, dans un univers ouvertement axé Code Quantum et Assassin’s Creed (puisque les voyages temporels pour le compte d’une organisation mystérieuse sont à l’honneur). Si la boîte de base ne contient qu’une unique aventure, il est évidemment possible d’acheter des scénarios supplémentaires, qui vous emmèneront aussi bien dans notre monde réel que dans des univers alternatifs. Ce jeu est prévu pour 2 à 4 joueurs et le joueur solo n’est a priori pas concerné. Néanmoins, comme T.I.M.E Stories est un jeu 100 % coopératif, il nous a apparu intéressant de voir si l’aventurier solitaire pouvait tout de même y trouver son compte.
Les joueurs solitaires sont-ils les bienvenus pour embarquer dans le Tunnel du Temps ? Vous le saurez dans quelques lignes…
Un unboxing qui boxe
Le concept de T.I.M.E Stories est donc d’utiliser des cartes pour véhiculer sa narration, là ou les JDR fonctionnaient sur plan et les Livres dont vous êtes le Héros sur paragraphe. Mais dans les faits cela ne change pas grand chose : il s’agit avant tout pour un groupe d’aventuriers de venir sauver le monde avant que de méchants paradoxes temporels ne viennent tout faire sauter.
Le truc avec T.I.M.E Stories, qu’on y joue seul ou à 4, c’est que la boîte de base pose en effet un problème de fond. C’est en effet ce matériel que nous allons utiliser pour l’ensemble des extensions qui seront achetées plus tard. Hélas, 3 fois hélas, sous un emballage digne d’un i-phone 12, on se retrouve avec du matériel bas de gamme qui fait peu envie. Pions mal découpés, thermoformage trop fin (et donc déchiré), dés trop légers… Seules les cartes du premier scénario sont de toutes beauté avec une direction artistique tout simplement fantastique. Autant dire que ça la fout mal : la mission n’est pas commencée que je n’ai déjà pas envie d’utiliser les pions, sur lesquels je dois mettre des autocollants tout seul comme un grand. Non, non et non.
Second point qui fait grincer des dents : le jeu coûte 40 euros et vous permet de jouer à… 1 scénario. Si le concept en soi ne me choque pas, je trouve véritablement dommage de ne pas avoir inclus un mini scénario « tutoriel » pour se faire la main. Comme les règles sont parfois imprécises à souhait, on tâtonne un peu le système de jeu tout en jouant, ce qui coupe l’immersion de ce jeu ultra narratif. Il faudrait donc pouvoir assimiler les règles au préalable, ce qui n’est hélas pas possible. Bref : le contenu est insuffisant.
C’est d’autant plus dérangeant que les illustrations et que le ton de ce premier scénario sont tout à fait satisfaisants. On prend plaisir à visiter les moindres recoins de la map avant de comprendrer qu’il faut rusher comme un sagouin pour sauver le monde dans le temps imparti… au bout du troisième essai.
Jouable en solo ?
Sur un plan purement théorique, rien n’empêche le joueur solo de vivre une aventure de T.I.M.E Stories. Prenant à sa charge 3 personnages, il peut sans souci vivre le scénario en mode full coop et dérouler l’histoire comme un Livre dont Vous êtes Le Héros graphique un peu schizophrène. Allant de lieu en lieu et d’énigme en énigme, il peut élucider les mystères de l’Asile ou résoudre le cas de Marcy en vivant un agréable moment. Les scénarios sont plein de rebondissements et parfois pleins d’humour, mais pas très longs : comptez deux à trois tentatives de 45 minutes chacune pour en venir à bout, surtout en solo. Une fois le scénario terminé… il ne restera plus qu’à le remettre dans la boîte et à l’oublier très fort pour pouvoir y rejouer. Si vous avez Alzheimer, c’est parfait. Sinon tant pis.
Plan à trois
S’il est jouable en solo, T.I.M.E Stories gagne tellement à être joué à 3 ou 4 qu’on ne saurait conseiller d’y jouer à moins. Pourquoi ? Tout simplement parce que le jeu à plusieurs permet de mettre en place l’un des aspects fondamentaux de T.I.M.E Stories : son aspect Jeu de rôles.
Les scénarios étant courts, ils reposent sur l’interprétation des personnages par les joueurs pour y gagner en fun et en profondeur. Chaque personnage ayant un background assez facile à prendre en main, cela donne des résultats très intéressants dans l’interprétation, qu’il s’agisse du soldat traumatisé de guerre ou de la jeune nymphomane. Le jeu met en effet l’accent sur l’interprétation afin de sublimer le scénario et de transcender ses propres limites. Même s’il s’agit d’un jeu 100% coopératif, il est demandé aux joueurs de ne pas se montrer les événements qu’ils rencontrent, mais de les raconter à leur manière aux autres joueurs, pour qu’ils aient l’impression qu’on leur rapporte du vécu, des faits. Les joueurs sont incités à vivre leurs personnages de la manière la plus expressive possible, et même à en changer, lors des runs différents qui constituent l’aventure. Le joueur ayant incarné la nympho aura-t-il autant de verve en incarnant la mamie acariâtre ? Cela peut paraître ancedotique, mais ça ne l’est pas. T.I.M.E Stories repose essentiellement sur la manière dont les joueurs vont interagir pour vivre le scénario.
Un Bilan Solo mitigé
Cette dynamique de roleplay, évidemment absente du jeu solo, est une constituante fondamentale du jeu. On comprend alors pourquoi l’éditeur ne s’est pas risqué à coller la mention « jouable de 1 à 4 joueurs » sur la boîte, alors que rien ne l’empêche sur le papier. Jouer en solo à T.I.M.E Stories en revient à acheter un tome de « Loup Solitaire » pour 40 euros, alors qu’il y en a de très bons à 1 euro chez n’importe quel bouquiniste. Dit autrement : un joueur solo ne passera pas un mauvais moment en jouant à T.I.M.E Stories, mais il passera sans s’en rendre compte à côté de ce qui fait l’essence même du jeu. T.I.M.E Stories est un JDR sur plateau, et il mérite donc d’être traité comme tel, avec des échanges, des disputes, des accents foireux et des interprétations spectaculaires. Autant de choses qui sont hélas inaccessibles au joueur solitaire, qui va se contenter de résoudre une énigme pas bien compliquée et de regarder les jolies illustrations. Pourquoi pas. Mais il serait plus simple de trouver 2 ou 3 amis et de vivre les choses à fond. Non ?
A voir :